ET MAINTENANT, LA MALAISIE

Publié le par JB

Visiter la Malaisie n’est pas né d’un désir de voyage, c’est une opportunité qui s’est présentée à moi via le déplacement des Celts, mon équipe de football gaélique, à Kuala Lumpur pour un match amical ; je me suis contenté de sauter sur l’occasion. Quatre jours après mon arrivée en terres Malaisiennes, c’est la première fois que j’ai le temps de me poser et d’allumer l’ordinateur pour faire le point sur ce début de périple ; à ma droite, le soleil se couche au ralenti sur une eau turquoise, trois îlots rocheux brisant l’horizon de leur masse flottante. Je suis à Salang, sur la belle et touristique Tioman, au sud-est de la péninsule. On a tous débarqué à l’aéroport de KL vendredi soir, après 4h de vol. Il n’y a pas de décalage horaire avec Taïwan - les corps n’ont pas eu à ajouter le décalage à la fatigue physique -, on est donc sorti les sacs aussitôt posés à l’hôtel. Et la bière a vite fait de couler à flots… le lendemain, les jambes étaient lourdes. Je n’ai pas grand-chose à dire de cette soirée, si ce n’est que j’ai dû retrouver mon lit vers les 4h du matin, passablement ivre, après une chasse au rat dans le lobby de l’hôtel aux prix exorbitants (j’ai suivi le groupe ; mon choix aurait été plus… économique !). On a fêté l’anniversaire d’un autre membre exotique de notre chère équipe (normalement, le football gaélique, il n’y a que les irlandais pour y jouer !), Karsten, danois d’origine et donc irish de cœur. Il a joyeusement retapissé les toilettes du Finnigan’s - le bar dans lequel on a atterri -, après qu’on l’y a poussé aux premiers postillons intempestifs ; on n’est pas passé loin de la catastrophe en plein milieu de la salle ! Le samedi, l’équipe a pris part à trois matchs. Le premier, les jambes ont eu du mal à se mettre en route. Au second, on avançait un peu. Au dernier, on était cuit… On faisait une jolie bande de pied nickelés ! Nos hôtes ne se sont pas faits prier pour nous ridiculiser, à coup d’accélérations et de dribbles endiablés ; je pense qu’ils doivent encore rire de notre piètre performance. Le seul moment où ils ont paru forcer leur talent, c’est quand leur équipe A a rencontré leur équipe B… du coup, ça ressemblait un peu plus à une compétition sportive ! Et nous, on applaudissait à chaque point marqué, des tribunes. Si on faisait de bien médiocres adversaires sur le terrain, on s’est fait un plaisir de faire honneur à la troisième mi-temps ; au lever de coude, les Celts sont autrement plus performants ! Deux pints et demi plus tard, alors que les 18h venaient tout juste de sonner, on a regagné l’hôtel pour se doucher - enfin - et se préparer pour une nuit à hanter les boites de KL ; le pot organisé par nos hôtes n’était que l’apéritif de la soirée qui nous attendait. Malheureusement, la suite ne fut qu’une succession d’hésitations et de mauvais choix, et c’est encore tôt - pour notre dernière nuit tous ensemble -, à 2h du matin, que j’ai regagné ma chambre d’hôtel, finalement pas mécontent d’avoir une vraie nuit de sommeil devant moi… (au restaurant, la nourriture a mis trois jours à arriver ; on a raté la majeure partie du quart de final Argentine-Allemagne ; le bar où nous avons rejoint l’équipe adverse n’a pas fait l’unanimité - beaucoup en ont profité pour s’éclipser incognito ; le club dans lequel nous avons choisi de finir la nuit affichait un taux record d’une prostituée par client… c’est ainsi que j’ai sauté dans un taxi, direction un bon bain chaud et mon lit king size. Ce genre d‘endroit, très peu pour moi!) Le lendemain matin, j’ai végété dans mon lit ; et quand enfin je me suis décidé à me mettre en route, je me suis trompé de gare routière. Arrivé à la bonne après un long détour, le bus que je voulais prendre était déjà parti ; il y a des jours comme ça… Toute la journée, j’ai dû me trimballer mon sac sur le dos car je n’avais pas prévu de passer une nouvelle nuit sur place. Le bon point, c’est que KL se visite aisément à pied, le centre touristique n’est pas très étendu. De plus, la nuit venue, lorsque les lumières s’allument et que la ville passe en mode terrasses et lounges à gogo, se promener dans les rues multicolores de KL est un vrai bonheur. Je crois d’ailleurs qu’il s’agit du meilleur moment de la journée pour visiter la ville, entre le coucher du soleil et les douze coups de minuit. Avant, KL ressemble à n’importe quel autre grande métropole asiatique de type Hong Kong, avec ses malls à intervalles réguliers, ses tours qui percent le ciel et ses trottoirs larges et propres. Après, elle aurait plutôt tendance à plonger dans la luxure - elle se transforme en petite Bangkok -, avec ses étrangers en manque de sexe et ses filles importées d’un peu partout. Honnêtement, faites-moi confiance, rien ne vaut l’happy hour à Kuala Lumpur ! Les tours Petronas brillent de mille feux, c’est un point de repère pratique dans la nuit. A mon retour, il faudra que j’essaie d’obtenir un de ces rares tickets - donnés au compte goûte -, et que j’aille faire un tour sur le pont suspendu entre les deux tours. C’est juste dommage que ce soit fermé au public de nuit, la vue sur la ville serait extraordinaire. Je me contenterais sans doute d’un verre au Sky bar, à quelques centaines de mètres des Petronas, dans une tour initialement érigée pour améliorer les télécommunications (c‘est une sorte d‘antenne relais). J’aurais dû y aller dimanche soir, mais je n’ai pas voulu risquer de manquer un second bus. Le bus de 23h45 n’est arrivé qu’une heure plus tard, alors que la gare routière était déserte (à priori, le bus n’était pas au départ de KL, il ne faisait que prendre quelques personnes au passage ; en l’occurrence, un seul : moi !) Plus un seul guichet n’était ouvert, ils avaient même éteint l’écran affichant les bus à venir (à savoir : aucun avant 9h du matin selon les gars de la sécurité). Au comptoir de la compagnie avec laquelle je voyageais, il y avait un mot en malaisien ; il m’était clairement destiné. Après avoir tourné en rond un moment, j’ai demandé à quelqu’un qui passait par là de le traduire. « bus en retard. Appelez si problème », me dit le gars avant de filer. Il ne me restait donc plus qu’à attendre. J’ai bien cru que j’allais passer la nuit à la gare routière !… Arrivée à Kuantan à 3h40, avec vingt minutes d’avance sur l’horaire initialement prévu. Bizarre quand on sait le retard avec lequel on est parti de KL… Personnellement, ça ne m’arrange pas beaucoup, au lieu de passer une nuit complète à la gare routière de KL, je vais la passer à la gare routière de Kuantan… ça se vaut. J’essaie de positiver en me disant qu’à 6h, le trafic aura repris ; l’attente ne sera pas si longue que ça. A côté de la gare, un bar faisant des heures sup retransmet Espagne-Paraguay que j’avais raté la veille ; je prends un siège, et je me dis que le temps va passer vite, même si je connais déjà le résultat. Un peu avant 6h, le match terminé, je me dirige vers les comptoirs et j’attends. A 7h, je suis toujours en train d’attendre ; je lis Pamuk d’un œil endormi. A 8h, la gare routière commence à peine à s’éveiller - les Malaisiens ne sont décidément pas des foudres de guerres… Les comptoirs finissent par ouvrir et je demande un ticket pour le premier bus pour Mersing. Complet. (Intérieurement, j’enrage !) J’en prends un pour le suivant, à 10h30. Au final, j’aurais passé près de 7h dans cette gare… Je décide d’aller prendre un petit déjeuner pour calmer la fatigue et la frustration ; un petit quelque chose dans l’estomac ne peut pas faire de mal. Je me pose en terrasse d’un restaurant et je commande un café accompagné d’un petit déj’. 45 minutes plus tard, toujours rien ; je me lève et je m’en vais. (Il y a des jours comme ça…) Je me pose à la terrasse d’un second restaurant et je commande la même chose. Le tout arrive alors que j’essaie de déchiffrer les mots de Pamuk d’un œil morne. (Je crois que j’ai dû lire 100 pages de son Livre Noir sans comprendre un traitre mot de ce qu’il racontait… vive la fatigue et le manque de concentration que cela entraine !) Une fois dans le bus, je m’écroule littéralement ; je plonge dans un sommeil profond. Mersing est une petite ville de pêcheur d’où partent les navettes pour les îles alentours - Tioman y compris. La ville et ses alentours semblent charmant, j’y ferais sans doute une pause un peu plus longue au retour. Là, je cours jusqu’à l’embarcadère et je monte dans le premier bateau venu en partance pour Tioman. (Je m’étais promis d’arriver sur place avant la nuit.) La traversée dure environ 2h. 27h après avoir raté mon bus, j’arrive enfin, sur les rotules. Au total, j’ai dû dépenser 20€ - ce qui n’est pas grand-chose -, mais pour 50€, j’aurais pu faire le même trajet en 1h et en avion… c’eut été sans doute plus intelligent. Pour mon budget, c’est une économie qui me permettra de vivre une journée de plus sans retirer d’argent, ce n’est pas négligeable. Mais physiquement, après un week-end à picoler et à faire du sport, cette journée de voyage aurait dû être évité. C’était un mauvais calcul. J’ai du mal à me sentir heureux d’être là, tout ce que je veux, c’est un lit. Je n’arrive pas à profiter. Je marche le long des chalets en bord de mer, je fixe le coucher de soleil, je goute la température de l’eau cristalline, je suis censé être en plein rêve et tout ce que j’arrive à ressentir, c’est une profonde lassitude; je me sens tout à coup infiniment seul. Je suis dans un endroit paradisiaque - partout où je tourne la tête je vois des clichés de carte postale -, mais je n’ai personne avec qui partager cette expérience. Les gens rient autour de moi - en couple, en famille ou entre amis -, et je me dis que ce n’est pas un endroit pour un voyageur solitaire, j’ai fait une erreur en venant ici. Il est tard, je suis épuisé et c’est la fatigue qui parle, mais ce soir plus que n’importe quel autre soir, je me sens seul.
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